“Kiev peut attaquer le Donbass avant la Coupe du monde en Russie!”
L`interview de Geopolitica.ru avec le politologue, Président de l'association humanitaire Urgence Enfants du Donbass, Emmanuel Leroy au sujet de la situation actuelle dans le Donbass.
- Parlez-nous s`il vous plaît de la situation actuelle dans le Donbass. À votre avis, y a-t-il des risques d'escalade?
- Bien sûr. La situation dans le Donbass est complexe et extrêmement tendue. Il est certain que les occidentaux (avec eux, en particulier, les Anglais et les Américains qui sont impliqués totalement dans ce conflit) veulent pousser les Russes à la guerre. On peut voir cette volonté de provocation en Syrie et dans cette région du Don, mais les tentatives de déstabilisation touchent aussi d’autres pays, comme la Moldavie par exemple où les réseaux Soros sont très actifs pour pousser à la confrontation entre l’Est et l’Ouest.
Toutes les informations qui me reviennent du Donbass par les correspondants que nous avons là-bas font état depuis plusieurs semaines d’une augmentation très nette des tirs de snipers, qui tuent quasiment chaque jour des soldats sur la ligne de front. Manifestement il y a une volonté certaine de la part du régime de Porochenko et de ses amis occidentaux de lancer une offensive dans les prochaines semaines.
Les remontées de terrain que nous avons du Donbass prouvent que depuis la fin de l’année dernière et en violation complète des accords de Minsk 2, l`armée ukranienne est en train de mobiliser des matériels et des troupes en grand nombre derrière la ligne de front. Et ce n`est pas pour faire de la figuration. Il y aura probablement une offensive de l`armée ukranienne et de ses alliés de l`OTAN avant la Coupe du monde de football au mois de juin en Russie. C`est une grande crainte que mes amis du Donbass partagent avec moi, surtout quand on songe aux milliers de civils, dont des centaines d’enfants qui ont déjà payé de leur vie ou de blessures affreuses cette guerre que leur inflige l’occident.
- Que dit-on en France au sujet du Donbass?
- Le problème de la société moderne, qui est avant tout une société du spectacle, c`est que ce dont on ne parle pas dans les médias, ça n`existe pas. La question de Donbass n`est quasiment jamais abordée dans la presse française. Donc, si la télévision n’en parle pas, cela veut dire que le problème n’existe pas. Le Système est passé maître dans l’art de manipuler les foules en créant des écrans de fumée pour que les gens ne voient pas les choses importantes. En revanche, les médias mettront en exergue le message principal, à savoir que les Russes sont des assassins, des tortionnaires, des agresseurs. La preuve ? c’est qu’ils bombardent des populations innocentes en Syrie, qu’ils ont envahi l’Ukraine, et qu’ils assassinent leurs ex-espions avec des gaz soviétiques. En France, les gens qui s`intéressent à la Russie, à l`Ukraine et au Donbass et d’une manière plus générale aux problèmes de géopolitique dans le monde, c`est un tout petit nombre de personnes - 10% de la population au grand maximum. Et dans ces 10%, une moitié est soumise à la propagande occidentale des médias dominants, croyant que la Russie a attaqué le Donbass, veut arracher le Donbass à l`Ukraine, et est en train de préparer une offensive contre le régime de Kiev etc… Mais l’immense majorité des Français, hélas, ne sait absolument pas ce qui se passe dans le Donbass, ne sait rien des bombes qui tombent tous les jours sur des populations civiles, sur des écoles, des hôpitaux, des résidences…
Grâce aux réseaux sociaux qui aujourd`hui diffusent une autre parole et servent de contre-pouvoir aux médias du système, il y a de plus en plus de gens bien informés qui ont une vision plus équilibrée des choses, plus proche de la vérité, qui savent que l`armée russe n`est pas dans le Donbass, que la Russie n`a pas d`intention d`attaquer l`Ukraine, qu`il n`y a aucun intérêt – ni politique, ni géopolitique, ni économique – et que tout cela n'est que pur mensonge. Mais le Système a bien compris le danger qu’il y a à laisser s’exprimer la pensée dissidente sur les réseaux sociaux, et c’est pourquoi des mesures sont mises en place en occident pour dénoncer ce qu’ils appellent des «fakes news ». La France et l’Allemagne sont particulièrement en pointe dans ce dossier et je suis persuadé que des actions répressives sévères frapperont bientôt ceux qui essayent en Europe de lutter contre les mensonges des médias dominants.
- Avec votre association Urgence Enfants du Donbass, vous avez déjà été 5 fois à Donetsk depuis 2015 pour apporter de l’aide aux enfants en souffrance. Comment se passent vos missions ?
- Restons modeste, il est clair que sans l`aide humanitaire de la Russie, la situation dans le Donbass sur le plan humanitaire serait tragique. La Russie depuis le début des événements a largement contribué à soulager la misère de la population du Donbass. Je n’ai pas une vision globale de tout ce qui se passe dans le domaine humanitaire au Donbass, et je serais bien impudent si je prétendais vous faire un résumé exhaustif de la situation, mais je peux vous faire part de mon expérience personnelle qui a consisté depuis 2015 à rassembler des fonds auprès d’un noyau d’amis, à collecter de l`argent auprès de nos donateurs pour pouvoir engager nos actions sur place. Au départ, nous espérions pouvoir acheminer les dons (vêtements, matériel médical, jouets etc.) de France mais nous nous sommes heurtés rapidement aux grandes difficultés du transport de marchandises vers un pays qui officiellement n’est reconnu par aucun des pays frontaliers. C’est la raison pour laquelle, très vite, nous avons pris la decision d’acheter directement les marchandises sur place. Cela offre deux avantages : ça fait travailler le commerce local et c’est beaucoup plus simple à organiser qu’un transport à partir de Paris. Mais le plus simple pour se faire une idée précise de ce que nous avons fait depuis 2015, c’est encore d’aller sur notre site et de voir les compte-rendu, avec de nombreuses photos, de nos missions humanitaires dans le Donbass.
Il y a beaucoup de petites associations humanitaires dans le Donbass, certaines existaient déjà avant la guerre et d’autres se sont créées depuis. Nous travaillons avec certaines d’entre elles et par exemple nous avons déjà fait des missions ensemble qui ont consisté à aller dans les marchés acheter de la nourriture, et ensuite se rendre près des zones de la ligne de front, dans les quartiers régulièrement bombardés, où habitent les baboushka (grands-mères), les familles avec les enfants et qui n`ont quasiment plus rien pour vivre. Nous avons aussi fait un don de 5000€ à un orphelinat de Donetsk pour qu’ils puissant entreprendre des réparations, notamment d’électricité et de chauffage, détruites par les bombardements de 2015. Nous avons à trois reprises acheté du matériel médical pour l’hôpital de traumatologie de Donetsk. Toutes ces actions sont documentées sur notre site internet avec de nombreuses photos et vidéos.
Mais nous sommes bien conscients que l`aide que nous avons apportée, c`est un goutte d'eau dans l`océan. De mon point de vue, cette goutte d'eau est mieux que rien, mais surtout, nous voulons montrer aux habitants du Donbass que la France, la vraie France, celle du peuple, ne les oublie pas. Même si le discours officiel d’Emmanuel Macron - identique d’ailleurs à celui de ses prédécesseurs - est un discours aligné sur la propagande et les mensonges de l’OTAN, il est important que les populations martyres du Donbass, sachent qu’elles ne sont pas oubliées et qu’il y a encore dans mon pays des gens de coeur qui pensent à elles et qui sont prêts à leur apporter de l’aide.
Dans tous les cas de figure, je ne peux que souhaiter que cette guerre s’achève et que les habitants du Donbass retrouvent la paix et la sérénité. A mon modeste niveau, c’est ce que j’essaye de faire avec mes amis de Urgence Enfants du Donbass.
Vous avez rencontré l’écrivain-combattant Zakhar Prilepine au salon du livre russe à Paris en février dernier et vous avez convenu de réaliser ensemble une action humanitaire franco-russe dans le Donbass. Pouvez-vous nous en dire un peu plus ?
J’ai effectivement eu le plaisir de rencontrer ce grand écrivain russe à Paris qui a eu le courage de mettre sa peau au bout de ses idées en s’engageant dans l’armée de la République Populaire de Donetsk.
Emmanuel Leroy avec Zakhar Prilepine au Salon du livre russe à Paris en février 2018
Nous travaillons actuellement sur les dates où nous pourrions mener cette action ensemble. Nos relations directes sont un peu difficiles car il ne parle ni le français ni l’anglais, et mes connaissances en russe sont plutôt sommaires. Mais nous avons de bons amis communs qui parlent parfaitement le français et le russe, et je suis sûr que nous trouverons rapidement une solution pour monter cette mission humanitaire ensemble. Il est important aujourd’hui de montrer aux propagandiste de haine de l’OTAN et à leurs supplétifs que les peuples n’acceptent plus leurs mensonges et qu’ils sont prêts à travailler ensemble pour briser le cercle de haine dans lequel les Anglo-Saxons tentent de nous enfermer.