Le Cromlech, temple et espace intérieur du sujet radical

16.12.2022

La structure interne du sujet radical

Saint Bernard de Clairvaux (1090-1153), abbé cistercien, inspirateur et guide spirituel des Chevaliers du Temple, révèle la structure interne du Sujet radical ante litteram comme suit : "Vous trouverez plus dans les forêts que dans les livres. Les arbres et les rochers vous apprendront des choses qu'aucun maître ne vous dira" (Épître 106 n. 2). En fait, les saints de toutes les confessions et dénominations religieuses, en chaque siècle et dans leur expérience existentielle, étant assiégés et devant lutter directement et parfois face à face avec le seigneur du mal - prenez par exemple Padre Pio de Pietrelcina et Séraphin de Sarov, mais aussi les saints musulmans, hindous et bouddhistes - ont été en eux-mêmes des préfigurations objectives du Sujet radical. En fait, ils ont vécu en eux-mêmes le Chaos, la descente aux enfers et le nihilisme intérieur en plénitude, tout cela pour obtenir leur propre sanctification, même si la situation sociale et l'époque historique dans lesquelles ils vivaient étaient en un sens spirituellement meilleures et éthiquement moins dévoyées que la corruption finale et liquide de l'actuelle période postmoderne.

La phrase de saint Bernard est importante car elle nous révèle une partie pertinente de la structure interne du sujet radical, celle de sa symbiose avec la nature. Une symbiose, qui n'est certainement pas à comprendre dans un sens religieux panthéiste - qui pourrait toutefois coexister avec certains sujets radicaux appartenant à ce courant philosophique - mais une symbiose perçue dans un sens d'ordre existentiel et structurel. Il existe en effet des Sujets radicaux de différentes confessions qui vont dans des églises, des mosquées ou des temples, mais qui, structurellement, n'ont pas de tels bâtiments comme archétype intérieur, même si ceux-ci sont construits dans les sylves, parmi les arbres et sont bâtis avec des pierres. Au lieu de cela, leur archétype intérieur est représenté par la nature sauvage: bois, forêts, rochers, montagnes, glaciers, crevasses, cascades, lacs, océans, terre, eau, feu, vent, loups, ours, aigles, cerfs, lynx et plus encore.

Comme l'explique saint Bernard, en réalité, la nature leur parle du Divin et le Divin, en tant que maître, leur parle à travers la nature : il leur parle de son infinité, de sa beauté, de son immensité, de sa grandeur, de sa majesté, de sa gloire mais, surtout, de son amour infini qui a créé la beauté du cosmos pour l'être humain, placé par le Divin sur terre en tant que Prince de la création.

Cette symbiose avec la nature, nous révèle que la structure intérieure du sujet radical est de forme ancestrale, nous pourrions dire indubitablement adamique, et s'organise en une paire individu/tribu, dans laquelle l'individu clarifie sa pleine symbiose avec la nature, tandis que la tribu caractérise l'essentialité de sa structure intérieure dans les liens interpersonnels, sans les autres stratifications et sédiments d'un ordre psychologique, intellectuel et social causé par la civilisation. Intérieurement, cette structure innée qui s'organise comme "pensée sauvage" - pour reprendre une expression heureuse de l'anthropologue Claude Lévi-Strauss -, place le sujet radical dans une zone de limes par rapport au sentiment propre à la civilisation.

Mais précisément parce qu'il est un homme de la frontière, dans un monde devenu tabula rasa sous l'action pernicieuse du nihilisme postmoderne, il réveille par sa vie et son comportement la "structure ontologique-génétique du Soi primordial" et sa centralité dans l'existence des individus et des sociétés, afin de l'opposer catégoriquement à la "stratification dialectique-psychosomatique du Moi", lorsque ce dernier, justifié par la lex humana, s'écarte et s'oppose à la lex divina, la lex æterna, la lex naturalis.

Le Cercle de Pierres

"Les arbres et les rochers vous apprendront des choses qu'aucun maître ne vous dira". La structure interne du Sujet radical se trouve donc dans un état de quasi ressemblance avec la virginité naturelle des origines et est donc ouverte, irrépressible, substantiellement libre de tout schéma pré-constitué, de toute imposition culturelle et de tout dogmatisme intellectuel. Ce sentiment d'ouverture existentielle, d'incommunicabilité de l'âme et de liberté spirituelle, fait naître au sein du Sujet radical l'archétype d'une structure archaïque de temple intérieur que nous pourrions décrire avec la figure du Cromlech, le Cercle de pierres, établi par le Menhir, les Pierres longues. Non pas un cromlech élaboré comme celui de Stonehenge en Angleterre avec son système trilithique (c'est-à-dire avec les pierres verticales soutenues par des menhirs), mais plutôt comme ceux du cercle mégalithique de Callanish sur l'île de Lewis en Écosse ou du cercle de Brogdar dans les Orkneys écossais, où les menhirs en cercle s'élancent librement de manière brute, grossière et primordiale vers l'immensité du Zodiaque et de la voûte céleste.

De même que les menhirs disposés en cercle forment un cromlech ouvert, incontrôlable et libre - caractéristiques particulières, celles-ci, d'ordre spirituel et existentiel qui font partie de la structure interne du sujet radical -, de même leur manière brute, grossière et primordiale de s'élever vers le ciel représente également les qualités primaires de tout sujet radical authentique. La rudesse du caractère et du comportement métapolitique est ce qui distingue le sujet radical de l'idéal chevaleresque ou du sujet politique et, à cet égard, la phrase: "Tu n'es pas un chevalier mais un guerrier barbare!" circulant dans l'espace national-populaire par le sexe doux, synthétise cette connotation. Il en va de même, pour le même beau sexe, de phrases telles que "Il est impossible de vous proposer quoi que ce soit de bourgeois et de mondain!" et "Vous ne comprenez jamais que vous vivez au XXIe siècle et que, par conséquent, vous devriez au moins vous adapter et faire quelques compromis, parce que la vie est courte...", dénotent, respectivement, et plus que tout discours théorique, les connotations qualitatives par rapport à la substance brute, c'est-à-dire non structurée, du sujet radical - qu'il s'agisse indifféremment de l'homme ou de la femme, ainsi que sa substance primordiale, c'est-à-dire celle d'une conduite intemporelle liée aux principes de la Tradition.

Le cromlech est un cercle de menhirs immergés dans la nature et chacun des menhirs représente l'une des 12 vertus qui nous lient au Divin et nous mettent en contact avec Lui : la foi, l'espoir, l'amour, la miséricorde, la compassion, l'humilité, la bienveillance, le calme, le partage, la modération, la vitalité, la maîtrise de soi. Le cromlech est un cercle de pierres et sa circularité est l'un des signes de l'unité primordiale de l'homme avec sa propre ethnie, avec le cosmos et ses éléments, en particulier avec le soleil et la lune, éléments arcanes et primordiaux représentant la paternité et la maternité du Divin. Étant ouvert, libre et indéfinissable, le Sujet radical, qui par sa nature même, c'est-à-dire en lui-même, est étymologiquement et structurellement monarchique et non anarchique, doit librement mettre au service de la circularité caractéristique et typique de la communauté organique de destin à laquelle il doit appartenir de droit et surtout par devoir, cet ensemble de dons que le Divin lui a prodigués au moment où il a dit oui à son destin existentiel de transformation en un ardent guerrier et archer de la Tradition. Ce n'est que si le cromlech, d'être l'archétype intérieur du Sujet radical, réussit à se transformer en la réalisation communautaire de l'ordre militant de plusieurs Sujets radicaux, qu'il pourra devenir un symbole efficace et une opportunité concrète pour provoquer le Grand Réveil dans les réalités micro-sociales et par conséquent stimuler une lutte authentique dans le tissu métapolitique et macro-social pour l'avènement de la civilisation multipolaire.

La pierre sacrificielle

Au centre du cromlech intérieur, l'archétype et le symbole qui caractérisent la spiritualité du Sujet radical, nous trouvons la pierre sacrificielle. Elle représente l'image de l'appel, de la vocation et de la mission que le Divin donne et confie au Sujet radical. C'est sur cette pierre, sur cet autel grossier, qu'il écorche son âme dans la Grande Guerre Sainte pour annihiler l'égoïsme dialectique de l'Ego et faire resplendir l'altruisme ontologique du Soi. Une lutte quotidienne, cela, qui doit générer ténacité et courage combinés à la joie et au mépris, car le Sujet radical vit exclusivement pour la guerre intérieure et la guerre métapolitique et sait, avec certitude, que ce n'est qu'en soumettant totalement l'Ego au Soi qu'il atteindra la seule vraie liberté qui est la liberté de l'esprit. Ainsi, il pourra devenir l'humble maître du temps, de l'espace et de l'histoire et acquérir la perfection intérieure de l'immobilité, du courage, de la détermination, de l'impassibilité, ainsi que développer ces dons, fruits de la contemplation du Divin, que sont l'intuition, l'empathie, la pénétration, la conscience, la miséricorde et la compassion.

Pour se connaître vraiment, le Sujet radical doit affronter son Ombre, cette ombre de la mort qui, comme un oxymore, vit en lui et est le réceptacle de ses vices mortels, les conséquences de ses péchés et de sa négativité. Il doit écraser ses vices capitaux sur la pierre sacrificielle avec une force belliqueuse et angélique, en travaillant surtout sur l'orgueil, qui est la racine spirituelle de tous les autres, et sur la sensualité, car la luxure est le seul vice capital qui réussit à plier et à gagner là où tous les autres vices capitaux ont échoué dans leur tâche de tentation du mal, la luxure étant la racine biologique de tous les autres vices. Sur la pierre sacrificielle, le sujet radical doit également anéantir les conséquences de ses péchés qui le ramèneraient à une vie morale basée sur les expédients du laissez-faire et du chacun-pour-soi. De plus, il doit détruire sa propre négativité par la bataille du silence de l'esprit, cet esprit qui ment et ne nous donne aucune capacité objective de jugement mais seulement des impressions subjectives souvent fausses, altérées et débilitantes sur le plan psychophysique.

En travaillant sur sa propre ombre, le sujet radical fera enfin tomber le masque de sa fausse nature et de sa fausse personnalité. Ce masque sur lequel l'Ego a construit une fausse image de soi, projetant sur lui-même cette fausse conception du Divin par laquelle il s'est proclamé le dieu de lui-même, autour duquel les autres doivent tourner en l'adorant, en le vénérant, en proclamant qu'il est le meilleur, en le gonflant démesurément d'orgueil, de fierté et de vanité. Dans sa dureté et sa grossièreté, la pierre sacrificielle dans le cromlech intérieur du sujet radical est donc la seule chance de rédemption de la vie antérieure inutile et nauséabonde, loin de la Tradition et immergée dans l'isolement existentiel et la désintégration collective typiques de cette époque postmoderne. La pierre sacrificielle représente également l'arme privilégiée du sujet radical pour se transformer, car c'est le corps même du Divin qui se révèle prêtre et victime, qui prend en lui les faiblesses de la condition humaine et qui, par notre nécessaire et inéluctable coopération, le transforme et le transfigure en guerrier et archer ardent gardien du feu sacré de la Tradition.

L'épée dans la pierre

Au centre du cromlech intérieur de pierres se trouve la pierre du sacrifice et au centre de la pierre du sacrifice se trouve l'épée encastrée dans la roche. L'Épée dans la Pierre est un cadeau du Divin et représente l'investiture du Sujet Radical en tant que guerrier ardent de la Tradition, de celui qui a eu le courage surhumain de descendre dans les enfers de sa propre âme en écrasant les vices, les péchés et la négativité contre la pierre sacrificielle du Divin, menant la Grande Guerre Sainte en lui-même. Le sujet radical ne voit pas immédiatement l'épée enfoncée au centre de la pierre sacrificielle, car il doit purifier son âme en humiliant son Ego afin que la lumière du Soi puisse éclairer sa vision intérieure et ainsi voir. Ce n'est que lorsqu'il réalisera l'Ego vidéo, le voir spirituel, parce que l'œil spirituel est maintenant suffisamment purifié, qu'il pourra voir l'épée d'investiture enchâssée au centre de la pierre sacrificielle. Une épée qui est la forme de son âme, que le sujet radical perçoit comme étant la sienne et qui doit être tirée par lui.

Pourquoi l'épée est-elle enfoncée dans la pierre et qu'est-ce que cela signifie? La signification de ce symbole, pour le Sujet Radical, est de comprendre que les racines des vices capitaux et de l'hypertrophie de l'ego ne sont pas un produit ad extra et n'affectent pas seulement le corps et l'esprit mais, au contraire, ont leurs racines dans l'âme, dans la demeure du Soi. L'âme doit donc subir une longue purification et épuration, en particulier celle de l'orgueil, car selon les mots de ce grand maître de la vie spirituelle qu'est saint François de Sales: "L'orgueil meurt un quart d'heure après la mort de notre corps"; et, comme l'enseignent les Pères du désert: "Plus nous nous approchons de Dieu, plus la tentation est grande", car elle devient clairement une tentation satanique plus orgueilleuse, plus subtile et plus difficile à discerner et à combattre. Tirer une épée du rocher n'est pas la même chose que dégainer une épée, mais c'est un don suprême du Divin qui libère le Soi du conditionnement pécheur, c'est-à-dire qu'il permet à l'âme de se connaître, de se connaître dans le Divin et de connaître le Divin.

Lorsque le sujet radical réussit à extraire l'épée du rocher sur l'ordre du Divin, cette action mystique peut être réalisée parce que son ascèse spirituelle a atteint le point où il est complètement projeté dans l'altérité du Divin et de son prochain, s'oubliant lui-même et vivant dans une communion et une adoration perpétuelles, dans la tension spirituelle continue de l'écoute de la voix de Dieu qui est le vent subtil de l'Esprit, rempli de calme et d'immobilité. "Dieu dit à Élie: "Sors et sois sur la montagne en présence du Seigneur. Et voici que le Seigneur passa. Il y avait un vent puissant et impétueux pour briser les montagnes et briser les rochers devant le Seigneur, mais le Seigneur n'était pas dans le vent. Après le vent, un tremblement de terre, mais le Seigneur n'était pas dans le tremblement de terre. Après le tremblement de terre, un feu, mais le Seigneur n'était pas dans le feu. Après le feu, le murmure d'une douce brise. Dès qu'il l'entendit, Élie se couvrit le visage de son manteau, sortit et se tint à l'entrée de la grotte. Et voici qu'une voix s'adressa à lui, disant: "Que fais-tu ici, Élie ?". (Extrait du Premier Livre des Rois 19:11-13)

La danse cosmique

Enfin, à l'intérieur du cercle de pierre, au milieu de l'altérité totale, se déchaîne dans les profondeurs de l'âme du sujet radical la Danse Cosmique faite de louanges du divin, d'adoration, de glossolalie, de danses tribales, de danse de la pluie, de danse du soleil, de danse de la lune, de danse du zodiaque, de danse des esprits angéliques, de danse des épées, toutes danses sous l'influence directe de l'Esprit Saint qui dirige cette explosion de louanges cosmiques dans une liberté suprême. Ce que l'Occident post-moderne a perdu, contrairement à d'autres pays géo-ethniques et géopolitiques, c'est précisément le sens tribal de la danse - à quelques exceptions ethniques locales près -, tout comme a disparu la perception que le mouvement libérateur du corps est capable d'éteindre l'esprit et de libérer l'âme au seuil du Créateur des cieux, de la terre et de l'immensité de l'univers. La Danse Cosmique est la plus haute louange du Divin et la plus grande extériorisation de la puissance de la Tradition, car elle seule est capable d'engager l'être humain dans la totalité de son corps, de son âme et de son esprit et d'unifier les pensées, les sentiments, les émotions et les sensations dans le courant unificateur du mouvement corporel.

L'une des caractéristiques du sujet radical est précisément de tout faire en dansant intérieurement et en créant autour de lui l'harmonie du Kosmos dans la paix comme dans la guerre, dans l'action comme dans la contemplation, dans la joie comme dans la peine, dans la vie comme dans la mort. La danse cosmique est comme le soleil-svastika avec ses bras en forme de faux, un soleil qui tourbillonne dans le cosmos en créant l'harmonie et en fauchant les esprits de l'enfer. Tout comme le soleil-svastika, le sujet radical tourbillonne dans la danse cosmique en tant que guerrier ardent et archer-gardien du feu sacré de la Tradition, déplaçant dans ses membres l'horreur du Chaos et l'ordre du Kosmos, fauchant et annihilant les promoteurs de l'Anti-Tradition, lançant des fléchettes incendiaires contre les puissances des ténèbres et l'anti-société liquide postmoderne. La danse cosmique doit être effectuée en commun par les sujets radicaux, héritiers spirituels des anciens kshatriyas. Certainement pas dans l'affirmation d'une nouvelle religion à placer à côté des religions traditionnelles, mais dans l'expression particulière d'une nouvelle religiosité guerrière, qui doit retrouver son ubi consistam même au sein du christianisme oriental et occidental, pour pouvoir enfin revenir danser avec le Prince de la milice céleste saint Michel et tous les anges guerriers autour du Deus Sabaoth, le Rex regum et Dominus dominantium, dans la fureur et la consolation du Paraclitus.

... Encore une fois, les Hommes de la Tradition, se souviennent de la dernière fois où les Mousquetaires du Roi de France, ont fait la Danse des Epées devant l'ostensoir de l'hostie immaculée du Fils de Dieu, pendant la procession du Saint Sacrement, alors que leur Roi s'agenouillait en adorant le Seigneur... et ils souhaitent sa restauration future, car la danse des épées sera la danse cosmique de l'Empire européen qui reviendra à la croyance et à l'amour de son unique Seigneur, trois fois Saint, Dieu des Armées, qui remplit les cieux et la terre de sa gloire...

Traduction par Robert Steuckers