Première historique : le Pape et le patriarche orthodoxe de Moscou vont se rencontrer
Pour la première fois de l'histoire, le pape catholique va rencontrer le plus important patriarche de l'orthodoxie, celui de Moscou, Cyrille 1er, sur l'île de Cuba, le 12 février.
C'est une première dans l'histoire des Églises chrétiennes. Paul VI en avait rêvé, Jean-Paul II a tout fait pour y arriver, le pape François va le réaliser: le 12 février, sur l'île de Cuba, lors de son voyage vers le Mexique, il va rencontrer le patriarche orthodoxe russe Cyrille.
L'île de Cuba a été choisie dans le souci de trouver un «terrain neutre» qui ne soit pas considéré comme un fief catholique car ce rendez-vous - désiré par le pape catholique tout comme par le patriarche orthodoxe de Russie - aura du mal à passer dans les milieux conservateurs de l'Église orthodoxe russe qui se méfient du Vatican.
Les deux hommes ne se connaissent pas mais ils échangeront, lors d'une escale à l'aéroport de la Havane, sur des questions ecclésiales, sur l'oppression des chrétiens en Terre Sainte et sur la question de l'Ukraine qui empoisonne depuis longtemps les relations entre ces deux Église chrétiennes. Et, peut-être, sur un éventuel voyage du pape François à Moscou.
Au-delà de la question politique, le dossier ukrainien est en effet un terrain de conflit religieux depuis des décennies. Et en particulier depuis la chute du mur de Berlin, quand l'Église gréco-catholique (une Église orientale rattachée à Rome mais dont la liturgie et la culture sont proches de l'orthodoxie) très persécutée sous le régime communiste, retrouva sa vigueur en étant fortement soutenue par Jean-Paul II.
Plusieurs tentatives de rencontre entre Jean-Paul II et le patriarche Alexis II avortèrent
Cette renaissance de l'Église gréco-catholique ukrainienne et la politique explicite d'encouragement du pape polonais furent interprêtée par l'Église orthodoxe russe comme la preuve de la volonté de Rome de chercher à convertir la Russie au catholicisme… Ce qui refroidit les relations pour longtemps. Plusieurs tentatives de rencontre entre Jean-Paul II et le patriarche Alexis II, mort en 2008, à Vienne en particulier, avortèrent. De même, un projet similaire entre Benoît XVI et le patriarche Cyrille pourtant très proche de la culture allemande fut très sérieusement envisagé dans un monastère allemand.
Il ne fait aucun doute que la présence d'un pape latino-américain sur le siège de Pierre, a largement contribué au dégel même si les bonnes relations entretenues par François avec l'autre grand patriarche orthodoxe, celui de Constantinople, Bartholomée 1er, ne plaisent pas trop à Moscou.
Mais l'acte décisif qui peut expliquer ce rapprochement historique est la nette distance prise par le pape François - pape non européen - vis-à-vis des gréco-catholiques ukrainiens. Et surtout l'estime que l'actuel successeur de Pierre porte au président Poutine et à sa politique de protection des chrétiens dans le dossier du Proche-Orient et syrien en particulier, où la Russie est toutefois relativement isolée. Un rapprochement, même indirect, via l'aura du pape François peut donc aider l'Église orthodoxe mais aussi la Russie. Tout comme confirmera-t-il la politique d'ouverture tous azimuts de François.
«Cette rencontre des primats de l'Eglise catholique et de l'Eglise orthodoxe russe, préparée depuis longtemps, sera la première dans l'histoire et marquera une étape importante dans les relations entre les deux Eglises», a commenté le Père Lombardi, porte parole du Vatican, vendredi, en annonçant la nouvelle.