Tafta : la suspension gagnante

02.09.2016
On nous a vanté les mérites du TAFTA pendant des mois et finalement… plus rien. En début de semaine, nous apprenions que la France avait suspendu les négociations. Bonne nouvelle ou tour de passe-passe électoral ?

Il devait faciliter les échanges commerciaux entre l’Union Européenne et les Etats-Unis, tout le monde serait gagnant ! Finalement le Traité Transatlantique serait au point mort et ce, parce que les conditions n’étaient pas réunies pour s’accorder, mais cette suspension apparaît bien brouillonne. D’un côté, le vice-chancelier allemand, Sigmar Gabriel, annonçait que le traité était bel et bien “enterré” faute de fléchissement américain. De l’autre côté, Margaritis Schinas, le porte-parole de la commission européenne, affirme que les accords sont en bonne voie. Alors qui dit vrai ? La réalité, c’est que les 2 personnalités ne poursuivent pas les mêmes objectifs…

Si la Commission œuvre clairement pour trouver un accord, les Allemands sont quant à eux suspendus aux élections législatives de l’an prochain et les débats autour du TAFTA se durcissent depuis plusieurs mois. Les différents côtés de l’échiquier politique faisant office de figure de proue de la contestation. En France, François Hollande, s’il espère une réélection, ne peut supporter un sujet si clivant pour ne pas se couper de son extrême-gauche. Apparaître ainsi comme le président qui s’affirme face aux puissants pour faire cesser les négociations est donc tout bénéfice pour lui. Du côté américain, Donald Trump, fervent opposant au TAFTA dérangeait la candidate des multinationales, Hillary Clinton, ouvertement favorable aux accords… En effet, cette position déplaît à l’aile gauche du parti démocrate, qui soutenait Bernie Sanders… La suspension arrange donc tout le monde en éludant ce douloureux sujet des débats.

Mais la démonstration ne s’arrête pas là. Car le principe même de suspension est à modérer. En sous-main, les discussions sont loin d’être suspendues. En effet, la Commission européenne, dont les représentants ont le pouvoir de décider des accords ont toujours les mains libres et poursuivent leurs discussions dans l’ombre de Bruxelles.

Plus fort encore, le CETA, l’accord entre l’Union Européenne et le Canada, lui, fait son petit bonhomme de chemin. Moins connu par les citoyens, il est également moins redouté, notamment en France. La proximité du Canada par sa langue et son histoire, facilitera sans doute le passage d’accords avec ce pays qui effraie bien moins que le géant américain… Une fois scellé, le CETA sera toutefois un argument de poids pour faire revenir en grande pompe le TAFTA, arguant que son petit frère a prouvé qu’il était une avancée positive. Pourtant, le CETA n’apparaît pas plus positif si l’on s’attarde. S’il ne reprend pas la possibilité pour les multinationales de saisir des tribunaux privés si elles s’estiment lésées, il permet toutefois un système d’arbitrage SEMI-public… conservant toujours le problème d’indépendance des juges et de déséquilibre puisque seules les entreprises pourront saisir la justice.

Finalement donc, tout se déroule comme prévu, avec une bonne dose d’électoralisme !