Le Front National ne gagnera pas tout seul !
Les 27, 28 et 29 mai prochain, Robert Ménard organise, avec Valeurs Actuelles et Boulevard Voltaire, Le Rendez-vous de Béziers, une série de débats au Palais des Congrès de Béziers avec plus de 45 intervenants qui débattront pendant trois jours sur dix grands thèmes, afin d’établir un programme pour la droite en 2017. Lengadoc Info est allé à la rencontre de Robert Ménard qui a bien voulu répondre à nos questions.
Lengadoc Info : Robert Ménard, quel est l’objectif de ce Rendez-vous de Béziers ?
Robert Ménard : Il est de regrouper les droites. Je suis sidéré par, d’un côté l’affirmation des gens qui se situent à droite, « qui disent que la situation est grave, que l’identité de la France est en danger, la crise économique est une crise de civilisation » mais qui en même temps, chacun dans son pré carré dit « c’est moi le sauveur potentiel et pas celui qui est juste à côté de moi ». Je ne comprends pas ça. Si la situation est aussi grave que chacun le dit, et je partage ce diagnostic, j’en tirerai comme conséquence que peut être il faudrait oublier nos querelles d’égo, nos intérêts de boutique et se mettre ensemble pour trouver une solution.
Qu’est-ce qu’on veut ? Cinq ans de plus des mêmes, de cette gauche de gouvernement ou de cette droite de gouvernement qui ne sont pas la solution ? Monsieur Macron d’un côté ou monsieur Juppé de l’autre, c’est ce qui va changer la situation ? Il faut trouver autre chose, il faut regrouper tous les gens qui ont quatre-vingt-dix pour-cent d’idées en commun.
Lengadoc Info : Le slogan de ces trois jours c’est « Pour ne pas attendre 2022 », pour vous il y a un risque qu’en 2017 les gouvernants soient toujours les mêmes ?
Robert Ménard : Absolument. Aujourd’hui, il paraît plus hypothétique qu’un Mélenchon d’un côté ou une Marine Le Pen de l’autre ou encore Nicolas Dupont-Aignan, gagne les élections, ça ne paraît pas crédible. Pour moi, ça ne peut fonctionner à droite, qu’autour d’une épine dorsale qui est le Front National mais avec d’autres gens. Le Front National ne gagnera pas tout seul.
Lengadoc Info : Qu’est-ce qui manque aujourd’hui au Front National pour gagner les élections ?
Robert Ménard : Un programme économique crédible, qui prend plus en compte la liberté des chefs d’entreprise. Aujourd’hui on a besoin, non pas de plus d’État mais de moins d’État. On a besoin de moins de fonctionnaires, de moins de lois, de moins de règlements, de moins d’administration. On a besoin que cette société respire et non pas d’instiller de la lutte des classes dans les PME et qu’au-delà des divergences que l’on peut avoir quand on est patron et salarié, on a quand même, aujourd’hui, plus de points communs que d’intérêts divergents. Et ça dans le programme actuel du Front National je ne le vois pas.
En plus quand j’entends M. Florian Philippot expliquer qu’au fond la culture du bonsaï est aussi importante que la lutte contre le mariage pour tous, c’est insultant pour les gens comme moi, les millions de Français qui sont descendus dans les rues parce qu’ils pensent que la famille ça doit se défendre et que jusqu’à preuve du contraire, une famille c’est avec un homme et une femme.
Je le dis à Marine Le Pen. Marine aujourd’hui tu es en position de force, ce n’est pas une faiblesse de s’ouvrir aux autres. Quand on est candidat à une élection présidentielle on est pas non plus candidat pour un parti, c’est un dialogue entre une personnalité et un pays. Honnêtement, quelle différence de fond y a-t-il entre Marine Le Pen, Marion Maréchal Le Pen, Nicolas Dupont-Aignan, Philippe de Villiers, Henri Guaino, Jacques Myard, Eric Ciotti et Thierry Mariani ?
Lengadoc Info : Vous souhaitez une union de la droite mais pour l’instant ce n’est pas vraiment ce que l’on peut voir…
Robert Ménard : Il faut les obliger. Je vais prendre un exemple : les Veilleurs, à la suite de La Manif Pour Tous, ils ont bousculé les choses en profondeur, toute une génération à droite qui s’est dit que finalement ils pouvaient s’intéresser à la politique, que ce n’était pas sale, la politique, et qu’il fallait en faire . D’une certaine façon également, les gens de Nuit Debout, que je ne réduis pas aux violences, disent leur déception de la politique. Je partage ce diagnostic, on ne peut plus faire de la politique de cette façon. C’est pour ça que je réunis tout ces gens là les 27,28 et 29 mai à Béziers, c’est pour ça qu’il n’y aura pas un politique à la tribune. L’objectif c’est d’obliger la classe politique, en l’occurrence la droite, à changer de fonctionnement.
Lengadoc Info : Vous avez commencé votre carrière politique à l’extrême-gauche et aujourd’hui vous voulez écrire le programme présidentiel de la droite. Comment percevez-vous votre parcours ?
Robert Ménard : Je ne vois pas, au fond, de vraie rupture. Le milieu que je fréquente, disons « la droite de la droite », ça ressemble étrangement à l’extrême-gauche. Ce sont les mêmes comportements, la même abnégation. Vous croyez que vous faites carrière dans la vie quand vous êtes à Lutte Ouvrière ? Et quand vous militez au Front National c’est avoir que des emmerdes, personnellement, professionnellement, familialement, socialement. Il y a quelque chose dans le comportement qui est identique entre ces deux bords politiques. Et puis c’est deux façons différentes de dire la même chose : on ne veut pas du monde tel qu’il est. Moi je me suis trompé pendant des années, j’étais marxiste et j’avais sous-estimé le poids de l’identité, de la culture.
Propos recueillis par Jordi Vives
Photos : DR
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