La Syrie retourne à la Ligue arabe malgré l’opposition des États-Unis
La Syrie est de retour au sein de la Ligue arabe après en avoir été expulsée il y a 11 ans en raison du changement de régime vicieux initié par les États-Unis et soutenu par plusieurs pays arabes et européens. La Syrie a résisté à l’agression avec l’aide de l’Iran et de la Russie, mais elle en est ressortie dévastée et réduite – un tiers est toujours sous occupation américaine par l’intermédiaire des Kurdes – et épuisée par les sanctions, qui sont restées en place malgré le récent tremblement de terre qui a détruit le pays.
Concernant la situation tragique en Syrie, un rapport de l’ONU, rapporté par CNN, note que « les niveaux de pauvreté et d’insécurité alimentaire auxquels sont confrontés les Syriens sont sans précédent ». Le Programme alimentaire mondial estime que d’ici 2022, « plus de 12 millions de Syriens, soit plus de la moitié de la population, seront en situation d’insécurité alimentaire ». Les sanctions en sont la cause, mais CNN ne peut évidemment pas dire que son pays et l’Europe affament un peuple entier…
La défaite des États-Unis
Au-delà des détails, il reste la réintégration de la Syrie dans l’œcumène arabe, qui a été fortement entravée par les États-Unis (Jerusalem Post), obsédés par leur haine irréductible d’Assad. À tel point que samedi dernier, avant le vote de l’assemblée arabe sur la question, le conseiller américain à la sécurité nationale Jake Sullivan s’est précipité à Riyad pour s’entretenir avec le prince Mohammed Ben Salmane, architecte du retour dans le giron arabe de Damas.
Selon Axios, les deux hommes ont parlé de la paix au Yémen et de certains projets d’infrastructure visant à relier plus étroitement les pays du Moyen-Orient et l’Inde.
Ils voudraient créer une alternative à l’intégration du Moyen-Orient dans la route de la soie chinoise, en cooptant l’Inde – le rival de la Chine – dans un projet alternatif dirigé par les États-Unis, qui verrait l’adhésion future d’Israël. Une tentative qui pourrait ne pas aboutir, notamment parce que, comme le note Foreign Affairs dans un article intitulé « The Wrong US Bet on India », « New Delhi ne se rangera pas du côté de Washington contre Pékin »…
Cependant, le timing de la visite de Sullivan, qui est arrivé à Riyad la veille du vote fatidique sur la Syrie, ne nous échappe pas. Il a manifestement tenté une dernière fois d’éviter une telle démarche, mais n’y est pas parvenu. Une défaite pour la diplomatie américaine, comme en témoigne le fait que les premiers à se réjouir de ce qui s’est passé sont la Russie et la Chine, ses antagonistes mondiaux.
Le nouvel activisme de Riyad
L’étape a été douloureuse, comme en témoigne le fait que la réunion décisive pour la réintégration de la Syrie s’est déroulée à huis clos et que la décision a été prise à la majorité (The Cradle a mentionné l’opposition du Qatar dans l’article « Ennemis jusqu’au bout »).
Le retour de Damas au sein de la Ligue marque un nouveau point en faveur de la diplomatie saoudienne, qui le souhaitait vivement, s’exposant ainsi aux représailles des nombreux ennemis d’Assad.
C’est un moment très important pour Mohammed Ben Salmane qui, de moteur de la déstabilisation régionale (pour le compte d’autrui), a endossé le rôle de moteur du nouvel ordre moyen-oriental, comme en témoigne aussi la détente avec l’Iran.
L’activisme déployé à l’égard du conflit soudanais, qui a éclaté il y a quelques jours en raison de la rivalité de deux puissants seigneurs de guerre locaux et des manœuvres des néocons qui ont alimenté des rivalités latentes, s’inscrit également dans cette perspective.
Riyad a accueilli un sommet entre les factions rivales (Guardian). Il n’y a pas encore d’accord, mais le simple fait d’amener les duellistes à la table des négociations est une réussite remarquable. Nous verrons bien.
Source : Piccole Note via Euro-Synergies