L'Etat français veut professionnaliser le suivi des 13.000 personnes signalées comme islamistes radicaux.

Vendredi, 6 mai, 2016 - 08:30

 

Défriché par de rares pionniers il y a deux ans à peine, le champ du désembrigadement des personnes ayant basculé dans l'islamisme radical est désormais investi par un maquis de thérapeutes, de travailleurs sociaux et d'experts de tout acabit. «En 2014, il n'y avait guère qu'une paire de structures pour partir à l'aventure sur un terrain qui n'intéressait personne ou presque, rappelle le préfet Pierre N'Gahane, secrétaire général du Comité interministériel pour la prévention de la délinquance (CIPD).

Depuis les attentats de 2015, beaucoup d'acteurs s'y sont engagés dans une saine émulation et, parfois, pour des raisons d'opportunité.» Un document transmis cette semaine au ministère de l'Intérieur recense près de 75 structures reconnues et financées par l'État. Le montant global des subventions est passé de 500.000 à 6 millions d'euros entre 2014 et 2016, en augmentation de plus de 1 000 %! Portant sur l'«accompagnement psychologique», l'«accompagnement éducatif et social des jeunes», le «soutien à la parentalité» ou encore l'«écoute et l'accompagnement des familles», elles sont animées par des associations, des mairies, des conseils départementaux, des antennes Pôle emploi, des centres hospitaliers ou encore psychiatriques.

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Désormais, tous les voyants sont au rouge avec plus de 13.000 individus radicalisés. Face à la déferlante, l'appareil d'État a formé quelque 12.000 policiers, gendarmes, agents préfectoraux et municipaux, enseignants, hauts cadres de la SNCF, de la RATP ou encore des Aéroports de Paris. «Désormais, il s'agit de professionnaliser avec de vrais psychologues, de vrais médiateurs et de vrais médiateurs sociaux», martèle le préfet N'Gahane qui ne cache pas sa «méfiance» face aux initiatives de certaines associations cultuelles musulmanes ou de quartiers qui tentent d'occuper le terrain sous prétexte qu'elles seraient «plus proches» des radicalisés. Conscient que «la bonne monnaie va chasser la mauvaise», le Centre interministériel de prévention de la délinquance (CIPD) a lancé les grandes manœuvres. Partant du constat que «5 à 10 % des signalés présentent une pathologie psychiatrique» allant de la dépression à la schizophrénie en passant par la sociopathie de sujets décrits comme «border line», la Mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires, présidée par Serge Blisko, a été mandatée pour réunir des collèges de psychologues, de psychothérapeutes et de psychiatres afin de plancher sur les questions de désembrigadement et forger enfin des outils de références dignes de ce nom mis à la disposition d'un réseau d'experts. L'État mise sur le déploiement de 300 à 400 «psys» spécialisés et labélisés d'ici à la fin de l'année. Reste à faire travailler ensemble des spécialistes qui avancent en ordre dispersé. Et à trouver des référents partout en France, sachant que le pays souffre de déserts psychiatriques notamment en zone rurale où, pourtant, pousse en germe le salafisme.

Source : Le Figaro