L'Occident sans élites

20.08.2024

L'Occident, ou plutôt ce que nous en sommes venus à considérer comme l'« Occident élargi », a un grave problème de fond. Il semble substantiellement dépourvu d'une élite authentique pour le gouverner. Et pour orienter son action dans une direction concrète.

Cet Occident est certainement autoréférentiel. Et incapable de comprendre que le monde, et ses intérêts complexes et multiples, va bien au-delà des limites qu'il s'est inconsciemment imposées. Et qu'il croit être les limites du monde entier. Alors qu'elles ne représentent que les frontières d'une vision extrêmement limitée de celui-ci.

Cette incapacité s'avère être la plus grande limite de l'Occident actuel. Celui-ci ne peut même pas comprendre comment les aristocraties dirigeantes externes se meuvent dans la nouvelle réalité. Nous en avons eu la preuve lors de la visite, à bien des égards grotesque, de notre Giorgia Meloni en Chine. Elle a dit au dirigeant chinois Xi Jinping qu'il devait cesser de soutenir Moscou et la Russie dans le contexte du conflit ukrainien. Elle a reçu en retour un démenti poli et ironique à la fois.

Ironique, parce qu'il venait de la tête, absolue, de l'une des plus grandes réalités géopolitiques contemporaines. Et il a été reçu, mais pas compris, par un dirigeant hésitant d'un pays de moins en moins pertinent sur l'échiquier général.

D'autre part, la maigre figure de notre Meloni représente bien l'état des relations internationales entre l'Occident et le reste du monde. Ce qui, soit dit en passant, a pris des connotations bien plus dramatiques lors des rencontres entre la Chine et d'autres pays européens. En particulier avec l'Allemagne et la France, qui sont littéralement traitées comme des poissons de dixième choix par l'élite dirigeante chinoise.

Le problème, si nous pouvons l'appeler ainsi, réside toutefois dans l'incohérence substantielle des soi-disant élites occidentales. Qu'elles ne le soient pas... ou plutôt qu'elles soient des élites, s'il est encore permis de les appeler ainsi, qui sont essentiellement autoréférentielles. Et, de fait, dépourvues de tout lien avec la réalité des peuples qu'elles sont censées représenter.

Et « devraient » n'est qu'un pâle euphémisme, puisque les gouvernants occidentaux actuels sont totalement détachés de la réalité des peuples dont ils devraient, au contraire, être l'expression.

En effet, il s'avère que les oligarchies qui détiennent le pouvoir - même s'il est limité - dans les pays d'Europe occidentale sont pour l'essentiel déconnectées de la réalité des peuples qu'elles gouvernent.

La France en est le meilleur exemple. Une oligarchie homophile y a imposé des « jeux » qui ne sont rien d'autre que la célébration de ses propres « vices ». Totalement déconnectés de toute tradition et de tout lien avec le sentiment commun des Français. De la majorité des Français. Pas des petits groupes qui entourent le pouvoir autoréférentiel et s'en délectent.

Bien sûr, une discussion séparée concerne les États-Unis. Où, incontestablement, la réalité est plus complexe. Et le pouvoir n'est pas seulement entre les mains de petits groupes autoréférentiels.

D'ailleurs, l'un de ces groupes, actuellement au pouvoir, tente de forcer la main. Et de pousser les Etats à un point de non-retour dans le conflit, pour l'instant masqué et latent, avec la Russie.

Reste à savoir - et l'horizon est pour l'instant flou et incertain - comment cela se terminera.

Cependant, cela peut changer, apparemment, un plan de jeu. Pas la substance du jeu lui-même.

L'avenir du conflit en Ukraine peut rester incertain. Et, peut-être, avec un changement à la Maison Blanche - désormais très probable - il pourrait (mais le conditionnel est de rigueur) trouver une... solution pacifique.

Mais cela n'affectera pas la scène générale. Et, surtout, le Moyen-Orient. Où la tension est destinée à atteindre la chaleur du métal chauffé à blanc. Et le point de non-retour, quel que soit le président de la Maison Blanche.

Dans ce jeu, cependant, l'Europe semble complètement absente. Non pas tant en raison d'une subalternité des rôles - qui existe - que de l'inaptitude de ses prétendues élites.

En raison de l'incapacité désormais évidente de ces dernières à envisager les affaires du monde dans une perspective plus large.

Et non pas conditionnées, jusqu'à l'aveuglement, par leurs propres prédilections éphémères et substantiellement décadentes.

Source

Traduction par Robert Steuckers