Les travailleurs détachés dans le viseur

06.07.2016

L’Europe est-elle en train d’éclater en miettes ? Après le Brexit, les questions fusent. L’Italie s’apprête à renflouer ses banques au mépris des nouvelles règles bancaires européennes. L’Espagne et le Portugal ont annoncé qu’ils refuseraient les sanctions de Bruxelles pour non respect des règles en matière de déficits publics… et c’est au tour de Manuel Valls d’annoncer que la France pourrait ne plus appliquer la directive européenne sur les travailleurs détachés.

C’est surréaliste, mais pourtant vrai : on ne sait pas combien de travailleurs détachés européens sont employés en France, essentiellement dans le bâtiment… D’après la commission nationale de lutte contre le travail illégal… ils étaient environ 230 000 en 2014… Problème : en 2013, un rapport parlementaire parlait déjà de 220 000 à 300 000 travailleurs détachés en France ! En 2015, selon le ministère du travail, ils étaient 285 000. Mais certains économistes pensent qu’ils sont au moins 500 000, en comptant ceux qui travaillent illégalement en France, au noir.

Qui sont les travailleurs détachés en France ? D’abord, des Polonais, suivis par des Portugais et des Roumains… Les Polonais et les Portugais retournent une fois par mois ou tous les deux mois dans leur famille, avec leur paie en poche… des lignes de bus internationales leur sont mêmes dédiés, partant le vendredi soir, revenant le lundi matin de bonne heure, à temps pour embaucher.

Pourquoi les entreprises du bâtiment… principalement… font appel à des travailleurs détachés ? Parce qu’ils coûtent, évidemment nettement moins cher… Si les travailleurs détachés sont en théorie rémunérés au même salaire que les travailleurs français… parce que c’est la règle, les charges sociales prélevées sur leur fiche de paie sont celles de leur pays d’origine. Dans les faits, bien des contrôles révèlent que les travailleurs détachés sont souvent payés moins cher, parfois moitié prix, notamment, en trichant tout simplement sur le nombre d’heures déclarées. Ce qui réduit aussi d’ailleurs le montant des cotisations.

Si la France devait, demain, renoncer à appliquer la directive sur les travailleurs détachés, on ne sait pas trop ce qu’il adviendrait d’eux. Les entreprises françaises qui les emploient seraient elles contraintes de payer des cotisations en France, au taux français, cotisations qui ne créeraient pas de droits à ces travailleurs en France, en dehors d’un droit au chômage ? Seraient-ils massivement renvoyés chez eux, parce qu’ils ne seraient plus rentable financièrement de les employer en France… créant d’un seul coup d’un seul des centaines de milliers d’emplois disponibles pour des travailleurs français ?

En fait, c’est un peu comme pour le Brexit… personne ne sait vraiment ce qui va se passer après la sortie de l’Europe, pour le Royaume-Uni… personne ne sait vraiment non plus ce qui pourrait se passer en cas de coup d’arrêt au travail détaché en France. Une seule chose est sûre : il semblerait que les règles européennes créent plus de problèmes aux Etats membres qu’ils ne leur apportent de solutions, et que le démembrement de l’Europe de Bruxelles est bien en cours…

Source : TV Libertés